Les prochaines joutes électorales pour la conquête de la présidence de la Confédération africaine de football (CAF) s'annoncent impitoyables. En effet, des manœuvres de mise à l'écart de potentiels candidats semblent en marche. La preuve, par exemple : le comité exécutif dirigé depuis 1988 par le Camerounais Issa Hayatou veut faire passer au forceps une loi qui stipule que «tout candidat à l'élection à la présidence de la Confédération africaine de football devra être ou avoir été membre du Comité exécutif de la CAF». Cette proposition d'amendement en date du 20 juin 2012 est soumise par le président de la fédération algérienne de football, Mohamed Raouraoua, sera examinée lors du congrès extraordinaire de l'instance dirigeante, prévu pour se tenir le 3 septembre 2012 aux Seychelles.

Du coup, tout candidat à la succession d'Hayatou qui ne serait pas ou qui n'aurait pas déjà été membre du comité exécutif de la confédération n'a pas les droits légaux de se porter concurrent. En d'autres termes, et par exemple, si d'aventure le président de la FBF, Sita Sangaré, nourrissait l'ambition de diriger la CAF, sa candidature ne serait pas retenue, car il ne fait pas partie du comité exécutif qui gère le foot continental. Or l'actuel bureau que conduit le Camerounais ne compte que 16 membres issus de 15 pays (voir encadré). Si l'on considère que 54 Etats africains sont affiliés à cette confédération, on devine aisément qu'au cas où cette relecture des textes serait adoptée, quelque 39 pays non membres de l'executif seraient condamnés à ne servir que de faire-valoir une forme d'exclusion donc à grande échelle faire-valoir des fédérations et même de candidats qui ont sans doute de l'expérience et des choses à faire valoir à la CAF.

Ainsi donc, des pays comme le Nigeria, le Congo Brazzaville, le Sénégal et l'Angola, de grandes nations de football, seraient exclus de la course au poste suprême. Le Nigeria, qui a porté haut l'étendard du football africain pendant de nombreuses années dans les compétitions majeures que sont la CAN et la Coupe du monde serait ainsi privé du droit légitime de briguer la présidence parce que, tout bêtement, il n'a pas de ressortissant au comité exécutif. Le Liberia, le Bénin, le Niger, le Burkina Faso, qui se battent bon an mal an pour le rayonnement du football africain sur le continent et au-delà, n'auraient, eux non plus, aucun moyen de présenter un candidat si cette proposition passait. Et que dire de la Côte d'Ivoire, qui a pourtant un membre au comité exécutif de la FIFA et dont l’un des fils (Jacques Anouma) est un sérieux prétendant au titre ?

Par contre, un pays comme les Seychelles, qui n'a jamais participé à aucune phase finale de la CAN, parce qu'ayant, on ne sait trop comment, hérité de la première vice-présidence de la CAF à travers son représentant Suketu Patel, peut prétendre à la présidence de cette institution ? Au nom de quelle logique 16 personnes, fussent-elles membres de l’auguste CE de la CAF, doivent-elles s’imposer à l’ensemble des compétences et intelligences dont l’Afrique regorge, au risque de piétiner toutes les valeurs démocratiques que le football africain est en droit d’attendre de ses structures ?

Il est plus que jamais temps que les présidents de fédérations et d’associations sous-régionales fassent barrage à cette proposition afin que le football africain ne soit pas pris en otage. Ceux qui militent pour cet embrigadement de la présidence de la CAF, s’ils ne veulent pas se maintenir au poste, veulent tout simplement écarter ceux qui troubleraient leur sommeil. C’est vrai qu’on est tous d’accord avec Jean Jacques Rousseau que «le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit et l'obéissance en devoir», mais bon, il ne faut pas abuser de sa position dominante. Car les autres ne sont pas des cons, corvéables à souhait. Le football africain n'a pas besoin de bois sacré d'où on doit sortir des courtisans initiés à la flagornerie, encore moins des béni oui-oui, qui avaleraient tout ce que le maître à penser leur dicterait.

Notre foot a plutôt besoin des idées novatrices qui lui permettent d’avancer sur l’échiquier mondial, pas pour l’embastiller dans les mains d’un clan.



Kader Traoré







Voici les 16 membres du Comité exécutif de la CAF et leur nationalité :



Issa Hayatou (Cameroun, président)

Suketu Patel (Seychelles, 1er vice-président)

Almamy Kabele Camara (Guinée, 2e vice-président)

Adoum Djibrine (Tchad, membre)

Mohamed Raouraoua (Algérie, membre)

Magdi Shams El Din (Soudan, membre)

Tarek Bouchamaoui (Tunisie, membre)

Kalusha Bwalya (Zambie, membre)

Kwesi Nyantakyi (Ghana, membre)

Constant Selemani Omari (RD Congo, membre)

Leodegar Tenga (Tanzanie, membre)

Slim Aloulou (Tunisie, membre co-opté)

Molefi Oliphant OIG (Afrique du Sud, membre co-opté)

Anouma Jacques (Côte d’Ivoire, membre Comité exécutif de la FIFA)

Hani Aboo Rida (Egypte, membre Comité exécutif de la FIFA)

Hicham El Amrani (Maroc, Secrétaire général).